L’inséminateur sort une dose de la cuve d’azote. Par l’ouverture de cette grosse et lourde bonbonne, il tire un petit récipient au bout d’une longue tige dont le bout recourbé s’accroche au rebord. Il sort de la fumée glacée de l’azote une paillette en plastique, longue d’une dizaine de centimètres, la réchauffe quelques secondes dans un récipient minuscule et l’installe sur la sonde, coupe le bout de la paillette avec des ciseaux. Il glisse le tout dans son dos, entre sa peau et son tee-shirt -milieux tempéré, à l’abri du froid contre sa peau- enfile sa main et son bras droit dans un long gant de plastique rose et prend un peu de gel lubrifiant au creux de sa main. Il est prêt.
Il glisse sa main dans le rectum de la vache, l’agite dans un geste de ramassage et la ressort plusieurs fois pleine de bouse. Quand le rectum est en parti vidé, il peut sentir, à travers sa paroi basse, l’utérus, les cornes utérines et les ovaires, qui sont juste en dessous. Il sait si la vache est en chaleurs ou non. S’il connaît bien son métier, il peut sentir aussi si l’ovaire est trop petit, s’il y a un kyste, une inflammation, une malformation. Pour le moment, la dose toujours dans son dos, ce qu’il cherche, c’est le col de l’utérus.
Je ne suis pas inséminatrice mais j’ai déjà fait ce geste pendant mes stages. Je me rappelle bien la première fois. L’inséminateur que j’accompagnais m’avait tendu un gant en disant « A ton tour. » Il y avait une grande Montbéliarde, qui attendait tranquillement, attachée là. J’avais imaginé que, plongés dans le rectum de la vache, ma main et mon bras seraient serrés tout autour par les muscles mais j’ai eu la surprise de découvrir une cavité assez large, au fond de laquelle ma main clapotait.
« Qu’est-ce que tu sens ? M’avait demandé mon maître de stage-initiateur.
– Heu… de la bouse.
– Passe dessous.
Et j’avais glissé ma main sur le côté pour passer latéralement sous la matière molle.
– Tu trouves le col ?
– Non, je ne sens rien
de spécial.
– Bon, sors.
J’avais sorti un bras penaud, pendant que lui, cherchait le col.
– Voilà. Passe ton bras
sous le mien. »
Mon dos contre sa poitrine, j’avais passé la main sous son bras, puis sous sa main. Et là, juste là dans le creux de sa paume, il y avait une boule un petit peu plus grosse qu’une orange. Le col de l’utérus, que je croyais beaucoup plus loin en avant qu’il ne l’est en réalité, le col, qu’il faut passer avec la sonde à travers trois passages étroits successifs ; là est toute la difficulté.
La compétence d’un inséminateur se mesure d’ailleurs -entre autres- à cela, à son aptitude à « passer des cols » avec la sonde, à tous les coups, sans blesser la vache, pour aller déposer la semence tout au fond de l’utérus. Et pour ce faire, il tient le col dans sa main droite à travers la membrane musculeuse du rectum et avance lentement la sonde avec sa main gauche.
Parfois, les trois lumières du col sont alignées et la sonde avance sans encombre mais d’autres fois, l’une des trois est décalée sur le côté, alors la progression est délicate. A tâtons, il incline la sonde, il cherche le passage, il le trouve et à la toute fin, appuie avec son pouce sur le bout de la sonde qui, en poussant la paillette de plastique, éjecte à l’autre bout quelques
gouttes de semence. Et si tout va bien, neuf mois plus tard…
Je n’ai pas aimé ma période d’apprentissage à Rambouillet . Nous n’avions que 9 malheureuses vaches à triturer …les pauvres .
Heu , Philo , si tu as trouvé un col un peu plus gros qu’une orange , soit c’était une très vieille vache soit elle avait un sérieux problème !
Un col de vache est petit , pour une génisse , pas plus gros qu’un crayon sur à peu près 5 cm de long , pour une jeune vache , épais comme un tube de dentifrice et pour une vache qui a fait plusieurs veaux , on trouve un peu de tout : ça va de l’épaisseur d’une baguette de pain au pain tout court mais plus globalement c’est plutôt de l’épaisseur de la baguette toute fine .
Pas une vache ne se ressemble , et il y en a qui sont impossible à inséminer pas tant parce qu’elles ont une anomalie mais parce qu’elle font le “tuyau de poêle ” ou bien qu’un très fin cercle au niveau de l’anus te scie littéralement l’avant bras .
Bref , on pourrait écrire un bouquin à ce sujet tellement il y a de cas particulier
Pour ce qui est du pistolet , certains le mettent dans la botte , moi je préférais l’enfiler dans un autre gant que je mettais ensuite contre ma peau dans mon dos comme tu l’expliques …chacun sa technique anti choc thermique 🙂
D’autres même entre leur dents 🙁
Bonne fin de semaine à toi Philo , à bientôt !
Ah oui , on a eu enfin de la pluie :21 mm c’est encore bien peu mais toujours mieux que rien …
Oh là, oui, les pauvres bêtes… Là j’étais dans une ferme en situation normale, tant mieux.
Pour le col, alors laisse-moi me rappeler : c’était effectivement une Montbéliarde d’un certain âge. Et puis tu sais, c’était ma première fois donc c’était un ressenti qui n’était peut-être pas tout à fait conforme à la réalité… J’étais assez impressionnée, entre la peur de faire mal à cet animal et l’envie de bien faire… enfin, tu imagines.
(et aujourd’hui encore, je me considère comme totalement inexpérimentée ; contrairement à toi, je ne suis pas formée à l’insémination, j’ai juste fait un petit stage facultatif parce que j’avais envie d’en savoir plus… reconnaissons que c’est assez maigre. Mais c’est un bon souvenir.
Heu… entre les dents la sonde ? Beurk !)
PS : ici aussi un tout petit peu d’eau mais c’est loin d’être suffisant…